Très ancien village établi en bordure d’un grand chemin plus ancien encore, “la via” (la vie), mais aussi à proximité du ruisseau dénommé à tort “Goutte Soulore”.
Si le dit ruisseau n’a jamais charrié de pépite, par contre, son eau a été très bénéfique aux habitants puisque, outre de fertiles prairies, elle a permis l’installation d’une maillerie fort active.
Cette eau, retenue par l’étang Presle, situé en amont, fournissait la force motrice, puis immédiatement récupérée pour l’irrigation des prés grâce à un bief de niveau prolongé tant que possible, celui-ci passait sous les jardins, sous l’hort (voir horticulture), d’où le nom.
Tous ces vestiges sont encore visibles, et même des expressions sont restées qui confirment ce que disent d’anciens écrits: “les fosses des lai-lias” par exemple, sont des creux où trempaient les peaux des bêtes destinées à être tannées.
C’est ainsi que Benoît Lallias est dit “marchand tanneur” en 1688, cependant qu’en 1678 la maillerie est désignée “moulin à écorces” et que déjà en 1631 Denis Presle exerce la profession de “mailleur de coutume”. C’est assez dire Grâce à “labourage, pitourage” mais aussi “broyage et tannage” vivait là une communauté paysanne prospère, c’est ce que révèle le paquet d’obligations mis à jour en 1655, à la majorité de Denis et Paul Presle, héritiers de leur père Antoine décédé.
Ces reconnaissances de dettes émanaient de particuliers des environs et même de communautés dont les affaires allaient moins bien… C’était le cas de celle. de Chaudagne qui ne put se libérer qu’en cédant une partie de ses biens, l’acte de vente de 1665 en témoigne.
La Presle, à son apogée, était formée de quatre familles ou “parsonniers”: les Laurand, Laffias, Devaux et Presle, ces derniers originaires du lieu, les autres, des villages voisins.
Outre une conduite intelligente du travail que supervisait un “maître” élu, on prenait soin de ne pas disperser le patrimoine.
C’est ainsi que le 20 janvier 1656, trois mariages avaient lieu à l’intérieur du groupe et célébrés en l’église de Saint-Clément.
Il s’agissait de: Jacques Devaux et Clauda La Lyas Claude de La Lyas et Marie Devaux, Paul Presle et Denise Devaux.
Cependant, il était prévu par contrat notarié: Denis Presle et Etiennette Laurand et Jean Laurand et Nicole Presle.
Toutefois, la pression fiscale sorte d’impôt sur la fortune, qu’aggravait un vent d’indépendance, incitait les communautés villageoises à répartir leurs biens entre les parsonniers ainsi se constituant autour d’une famille des groupes plus réduits.
Le partage de la Presle eut lieu en 1678 entre les quatre parsonniers, les lots tirés d’un “chapiaux”.
Les trois premiers répartissaient le tènement du village et divisaient en trois la grande maison (actuelle Renoux).
Le quatrième attribuait les possessions extérieures qui échouèrent aux deux frères Denis et Paul Presle.
Ils partirent donc s’installer à Lallias- Pérard. Un peu plus tard, vers 1700, les descendants de Paul Presle, devenus chefs de famille et “marchands”, vinrent habiter à Chaudagne où ils étaient également possessionnés.
Cet article est tiré d’une étude en cours de réalisation, effectuée par l’actuel Denis Presle de la branche “Tartarao” et descendant du sus-dit Paul Presle, à travers douze générations parties de la Presle, Lallias, Chaudagne, le Rouère etc…
Chercheur obstiné, précis, rigoureux, Denis arrache aux archives peu à peu leur secret pour son plaisir, mais aussi le nôtre, nous faisant partager ainsi ses découvertes.
Quelques explications: L’état de “marchand” recouvrait plusieurs activités:
– collecteur de la production locale et revente aux utilisateurs extérieurs à la région.
– Donneur d’ouvrage en procurant la matière première aux artisans locaux.
– Enfin, par la force des choses, “prêteurs”, banquiers avant la lettre, dépannant leurs relations.
Pendant les 17 et 18 ème siècle, l’industrie textile était fort active, des débouchés s’ouvraient pour fils et tissus, créant dans les campagnes une activité secondaire très appréciée. Les trois opérations peignage (pignaô), filage et tissage se faisaient manuellement puisque les machines ne se généralisèrent guère avant 1850.
II s’agissait du chanvre qui se cultivait sur place, du lin produit dans le Nord et en Flandre, enfin la bourre de coton qui, venant d’Amérique ou du Levant, débarquait dans les ports.
Le Roannais étant devenu de bonne heure un centre actif de cette industrie, c’est donc de ce côté que s’orientait le commerce, le fleuve Loire favorisant le transport.
Robert Gay
Extrait BM 2002